LES
FIERS Béotiens la troupe rassemblée
Suivoit
Arcésilas, Léïtus, Pénélée,
Clonius,
Prothénor, illustres Généraux,
Qui
des flancs recourbés de cinquante Vaisseaux :
Pour
détruire Ilion, firent jadis descendre
Six
mille combattans aux rives du Scamandre.
SORTIS
des ports voisins, trente
vaisseaux légers,
Navigeant
sous les lois de deux vaillans Guerriers,
Deux
enfans du Dieu Mars, Ascalaphe, Jalmene,
Ont porté
les soldats de la riche Orchomêne.
Ploin étoient rangés, près
des Béotiens,
Les
quarante vaisseaux des braves Phocéens,
Qui,
nés dans les climats qu'arrosé le Céphise
A
Daulis & Pithon, Panope & Cyparise,
Suivirent
les deux fils du vaillant Iphitus.
DES
remparts de Bessa, d’Augée & de Cynus,
Les
quarante vaisseaux que fournit la Locride
Sont
conduits par Ajax, ce Guerrier intrépide,
Qui,
dans l'art de lancer le Javelot fatal,
Parmi
ses citoyens n'a point trouvé d'égal.
Du
fils de Télamon s'il n'a pas la stature,
Son
bras fait oublier le tort de la nature.
CES
peuples belliqueux que FEubée a nourris,
Ces Abantes légers,
l'effroi des ennemis,
Au
brave Eléphénor confiant leur fortune,
Sous
quarante vaisseaux ont fait mugir Neptune.
CEUX
qu'Athène vit naître en ses
fameux remparts,
Ces
peuples qu'Erecthée instruisit aux beaux arts,
Lui,
qu'alaita Minerve, & qu'enfanta la Terre,
Sur
cinquante vaisseaux ont apporté la guerre.
Menestée
est leur Chef, qui, dont l'heureux talent
De
ranger une armée & disposer un camp,
Auroit
de tous les Rois balancé la science,
S’il
n’eut de Nestor la longue expérience.
Svous vit, ô fils de Télamon,
Guider
douze vaisseaux aux rives d'Ilion.
Ade Sthénélus & du brave
Euryale,
Diomede
conduit sa troupe martiale,
Ces
jeunes Achéens, que l'Empire d'Argos
Envoya
vers ses bords sur quatre-vingt vaisseaux.
LMycêne & la vaste
Cléone,
L'opulente
Corinthe, Hélice & Sycione,
Du
seul Agamemnon reconnoissant la loi,
Fournirent
cent vaisseaux à leur superbe Roi.
Sa
vanité sourit, & se plaît à conduire
Mille
vaillans Héros soumis à son Empire.
Son frère
est près de lui. Le vaillant Ménélas,
Respirant
la vengeance, anime ses soldats,
Ces
combattans que Sparte, & Phares & Messêne,
Pour
venger les malheurs & les soupirs d'Hélène,
Chargèrent
dans les flancs de soixante vaisseaux.
Ici
sont les Guerriers d'Arène & de Pylos,
Des
champs de Cyparisse & des rives fécondes
Que
l'amoureux Alphée enrichit de ses ondes,
D'Elos, de
Dorion, murs qu'illustra jadis,
Par
ses chants & ses maux, l'orgueilleux Thamyris,
Lorsqu'après
un défi de ce Chantre de Thrace,
Les
Muses, punissant son indiscrette audace,
Lui
ravirent ensemble & les yeux & la voix ;
C'est
le sage Nestor, qui leur donne des loix.
L'éloquente
raison, le soutien des Empires,
Gouverne
par sa voix quatre-vingt-dix navires.
Ssoixante vaisseaux qu'Atride
lui fournit,
Le
vaillant fils d'Ancée, Agapénor conduit
De ses
Arcadiens la phalange intrépide,
Ces peuples
qui, nourris loin de l'empire humide,
Pour
la première fois en traversant les flots,
Ont
cherché des combats & des périls nouveaux.
LÀ
sont les Epéens qui, des rives lointaines,
Ont
suivi sur les mers quatre grands Capitaines.
Talpius,
Amphimaque, & le fier Diorès,
Et
Polyxêne égal à Mars lançant ses traits,
Commandent
l'habitant de cette vaste plaine,
Qui joint les murs d'Aleise & les
rochers d'Olêne.
Sur quarante
vaisseaux, bravant les flots amers,
Les voisins
de ces bords, fiers habitans des mers,
Rassemblant
sous Mégès leurs troupes conjurées,
Ont
quitté les douceurs de leurs isles sacrées.
CRoi que sa sagesse élève
entre les Rois,
Ulysse,
des climats gouvernés par ses lois,
A conduit ses
guerriers, ses braves insulaires,
Dans
les flancs colorés de ses poupes légères.
L'habitant
d'AEtolie obéit à Thoas.
Oinée
est dans la tombe : Un malheureux trépas
A
bientôt à ses fils ravi son héritage,
Du
fils de l'étranger devenu le partage.
Squatre-vingt vaisseaux, dans
les champs d'Ilion,
L'illustre
Idoménée & le fier Mérion
Ont
guidé des Crétois la phalange aguerrie,
Que
cent vastes Cités en leurs murs ont nourrie.
Tlépolême
conduit les trois nobles
tribus,
De ces
peuples que Rhode en son sein a reçus,
Le jour que
ce Héros, orgueilleux fils d'Alcide,
Du vieux
Lycumnius malheureux homicide,
Redoutant
sa famille, & fuyant son païs,
Sur
des bords plus heureux vint porter ses ennuis ;
Beaux
lieux, où Jupiter, signalant sa puissance.
D'une
main libérale épandit l'abondance.
Nirée,
à qui des Grecs le seul fils de Thétis
Auroit de la
beauté pu disputer le prix,
Nirée
est sur ces bords, Nirée a pris les armes ;
Heureux
! si sa valeur eût égalé ses charmes.
Peu
de guerriers daignoient accompagner ses pas.
D
Antiphe
& Phidippus ont, sur trente navires,
Rassemblé
les soldats de leurs divers empires.
M,
soutiens ma voix, Muse, daigne nommer
Ces
fiers Thessaliens qu'Achille fit armer,
Quand
ce Héros, brûlant d'illustrer sa jeunesse,
De
cinquante vaisseaux vint secourir la Grèce
Ce
peuple belliqueux, de combats affamé,
A perdu tout
le feu dont il fut animé.
Achille
est dans sa tente ; enivré de colère,
Il
abjure, en pleurant, & la gloire & la guerre ?
Et
contre Agamemnon, qu'il brûle de punir,
Fait des
sermens affreux qu'il ne doit pas tenir.
Lieux
charmans du Pyrrase, agréable
contrée,
Où dans un
bois sacré Gérés est honorée
Jadis
Protésilas conduisoit vos guerriers,
Avant qu'un
ennemi, de ses traits meurtriers,
Eût
frappé ce Héros, qu'un trop bouillant courage
Fit
le premier descendre au Phrygien rivage
Podarce
les conduit ; le Soldat éperdu
Le
suit en regrettant le Roi qu'ils ont perdu
Et,
bien qu'un même sang tous deux le ait fait naître,
Le
peuple,au lieu d'un Chef ne trouve plus qu'un maître.
Lfils chéri d'Admete, Eumélus
amena
Onze
vaisseaux partis des matais de Phéra.
P, chargé de ses flèches
fameuses,
Avoit
joint sept vaisseaux à ces flottes nombreuses,
Jusqu'au
jour où, les Grecs le laissant à Lemnos,
Par
ses gémissemens il troubla les échos,
Sans
cesse déchiré par l'horrible blessure !
Que
lui fit d'un serpent la profonde morsure ;
Mais
ses amis ingrats, qui négligeoient ses jours,
Bientôt
à sa valeur dévoient avoir recours.
Cependant
ses soldats, qui loin de lui languissent,
En
pleurant Philoctete, à Médon obéissent.
Instruits
dans l'art heureux de guérir
les humains,
Machaon,
Podalire avoient armé leurs mains,
Et
guidoient les guerriers nés aux champs d'CEchalie.
Des
sommets du Titane & des
champs d'Astérie,
Eurypile
a conduit, sur ses vaisseaux noircis,
De
nombreux combattans aux travaux endurcis.
Etalant la
fierté qu'un noble sang lui donne,
Polypétes
commande aux peuples de Gyrtone.
Fils
de Pirithoüs, gage d'un tendre amour,
Polypétes
naquit dans ce glorieux jour,
Où
son père, indigné de leurs sanglans ravages,
Chassa
des monts voisins les Centaures sauvages.
Sur
quarante vaisseaux sortis de ses états,
Léontus
avec lui commande ses Soldats.
Ll'habitant des
campagnes fertiles,
Où
le doux Titarese épand ses eaux tranquilles,
Lorsqu'aux
flots du Pénée il vient joindre ses flots,
Roule sur la
surface &, sans mêler ses eaux,
Coule
en ce nouveau lit comme une huile légère,
Ruisseau
pur que le Styx fait sourdre de la terre :
Là
Gouneus avec eux rassemble sous ses lois
Les
peuples que Dodone a vu naître en ses bois.
E
Sous Prototis
leur Chef, quittant la Magnésie, ;
Les
vallons de Tempé, les bois du Pelion,
Etoient
venus descendre aux rives d'Ilion.
Mdans ce camp rempli
d'illustres Capitaines,
Qui
vont du Simoïs ensanglanter les plaines ;
Muse, avant
de nommer le premier des Guerriers,
Consacre
dans tes chants les plus fameux coursiers.
Eumélus les
conduit, ô£ seul peut les conduire,
Ils devancent
les flots , les oiseaux & zéphire,
Age,
couleur, stature, entre eux tout est pareil,
Nourris
par Apollon dans les champs du soleil,
Pleins d'un
feu belliqueux, ils portent sur leur trace
L'épouvante
& l'horreur du fier Dieu de la Thrace.
Du
plus grand des Héros célèbre enfin le nom,
O
Muse, c'est Ajax le fils de Télamon,
Tant
qu'absent des combats, Achille plein de rage
A
son ressentiment immole son courage.
Lorsqu'Achille
paroît, Achille est sans rival:
Mais
il n'écoutoit plus que son dépit fatal,
Tandis
que les soldats de sa phalange oisive
A
des jeux différens s'exercoient sur la rive,
Ou,
des travaux du camp tranquilles spectateurs,
Tournoient
sur leurs vaisseaux des yeux mouillés de pleur
Et
laissoient leurs coursiers enfermés sous les tentes,
Baisser
auprès des chars leurs têtes languissantes.
C
Comme un
torrent de feux qui dévore les champs.
Avec un bruit
terrible on sent frémir la terre ;
Tel,
lorsque Jupiter , armé par la colère,
Frappe,
à coups redoublés, de son foudre bruyant,
Le
mont qui de Typhée est l'affreux monument.
Iris
, du Roi des Cieux messagère
immortelle,
Au
Conseil des Troyens en porte la nouvelle.
Sur
les ailes des vents elle arrive au Palais ;
Elle
a pris de Polite & la voix & les traits,
Polite,
que choisit sa patrie inquiète
Pour
épier les Grecs au tombeau d'AEsyete.
Eaborde Priam au milieu des
Troyens :
» Vieillard,
pour d'autres tems gardez ces entretiens ;
» La guerre
, dit Iris, environne vos portes.
»
Jamais mes yeux surpris n'ont vu tant de cohortes,
»
Tant de Chefs, de soldats de leurs armes couverts.
»
Plus nombreux que le sable au rivage des mers.
»
Hector, si mes conseils peuvent se faire entendre,
»
Rassemblez les Guerriers qui doivent nous defendre,
»
Et qui tous, differens de langage & d'habit,
»
Ne peuvent obéir qu’au chef qui les conduit.
Hde cette voix reconnoissant
les charmes
Sépare le
conseil & fait prendre les armes,
Ouvre
la porte Scée, &, du sein des remparts,
Fait
sortir un essaim de guerriers & de chars.
Non
loin de la Cité s'élève
une colline,
Que
les Dieux appeloient le tombeau de Myrinne
C'est-là que
de l'Asie on vit les nations
S'assembler,
& s'unir en divers bataillons.
Ldes Troyens, faisant
briller leur lances
Sous
les ordres d'Hector se dispose & s'avance.
Cque dans ces climats établit
Dardanus,
Sont
conduits au combat par le fils de Vénus,
Vénus,
qui sur l'Ida, complaisante Déesse,
D'Anchise
qui l'aimoit couronna la tendresse.
Les
deux fils d'Anténor, Archiloque, Acamas,
Accompagnoient
Enée & guidoient ses soldats,
Au
pied du mont Ida, dans les murs de Zélée,
Où
l'AEsepe en grondant roule une onde troublée,
Habitent
les Troyens que Pandarus conduit,
Ce Guerrier
qu'Apollon avoit jadis instruit
Dans
l'art de diriger des flèches meurtrières.
Dremparts
d'Apésus les
Phalanges guerrières,
D'Amphius
& d'Adreste avoient suivi les pas,
Ces deux fils
de Merops qui, volant aux combats,
Entraînés
à la mort par un destin suprême,
Ont négligé
l'avis d'un père qui les aime.
Asius,
s'avançant dans un char attelé.
De superbes
coursiers nés aux bords du Sellé,
Commandoit
l'habitant de Sestos & d'Abide.
Hà lancer un javelot rapide,
Les
Pelasges suivoient la voix d'Hippotoüs.
Sous
les lois d'Acamas ce du fier Pyroüs,
Ceux
qui de l'Hellespont habitent les rivages,
Les
Thraces, vont de Mars affronter les orages.
Lfiers Ciconiens ont pour chef
Euphémus.
L
L'Axius si
fameux par ses eaux argentées,
Pyrœchmés
conduisoit ses cohortes vantées.
Cqui dans
l'Enétie avoient reçu
le jour,
Sous
leur Roi Pylémene avançoient à leur tour.
Epistrophe,
Odius, jeunes & vaillans Princes,
Guidoient
les Citoyens de ces riches Provinces,
Où
la terre, docile à leur soin diligent,
Leur
ouvre les trésors de ses veines d'argent.
Loin
des remparts d'Alybe, ils volent au carnage.
QChefs des Mysiens excitent le
courage ?
C'est
l'Augure Ennomus, & le vaillant Chromis ;
Augure
malheureux ! Les destins ont permis,
Que
te désabusant de ta science vaine,
Achille,
de ton sang rougît bientôt la plaine.
Dchamps Ascaniens, du sein de
leurs Etats,
Ascagne
avec Phorcys ont conduit leurs soldats.
Même
vœu les unit, même ardeur les entraîne.
Du
pied du mont Tmolus les fils de Pylémene,
Antiphus
& Mestlès, ligués pour les Troyens,
Guidoient
les bataillons des fiers Mœoniens.
S& Glaucus, les Chefs de
la Lycie,
Pour
illustrer leurs noms vont exposer leur vie.
Lle Mont Mycale & ces
champs si fameux,
Où
le Mœandre coule en un lit tortueux,
Les
Cariens, connus par leur âpre langage,
Sont
venus signaler leur force & leur courage ;
Amphimaque
& Nastès les guidoient aux combats.
Malheureux
Amphimaque ! où portes-tu tes pas ?
Paré
comme une femme aux plus beaux jours de fête,
Insensé
! ton trépas sur ces rives s'apprête.
Pour
assurer ta gloire & défendre tes jours,
L'or de tes vêtemens
sera d'un vain secours ;
Et d'Achille
vainqueur dans les plaines de Troye
Tes
pompeux ornemens seront bientôt la proie.